jeudi, avril 01, 2010

But I thought this wouldn’t hurt a lot, I guess not (alcohol)

[ Les pensées, les émotions toutes nues, sont aussi faibles que les hommes tout nus, il faut donc les vêtir - Paul Valéry ]

Quand on est jeune, on est con, c'est pas moi qui l'ai dit, c'est Damien.

Tour à tour, je suis conne parmi les connes, puis -comme on le fait tous à un moment où à un autre- je me détache du troupeau, je vais m'asseoir sur une pierre en broutant une herbe immaculée, et je regarde.

Quand je regarde, je n'ai pas peur. Pas comme ma mère qui parle des jeunes avec des crucifix dans les yeux tellement elle est scandalisée par nos agissements. Pourtant, elle est loin d'être une coincée. Quand je parle des jeunes, je ne sais pas encore de quelle tranche d'âge je situe les bornes. Bien que cette connerie vénéneuse et virale contamine la majorité d'entre nous à l'adolescence, j'ai l'impression qu'elle déborde sur les plages de l'âge adulte, en vague vigoureuses.

J'ai l'impression, donc, que cette connerie touche à deux domaines majeur : l'alcool, et la musique.

Le sexe, biensûr aussi, mais je classe cette obsession autant dans la catégorie musicale qu'alcoolisée, elles même se recoupant parfois. Comme quoi, nos activités en société sont loin d'être subtiles.


La journée, tout le monde à la maison, à la fac ou au lycée, sur une terrasse avec une grenadine où au travail, il semble que seuls nous même ou nos amis comptent. A Montpellier, on marche, on prend le tram, téléphone dans une main, musique dans l'autre. Certains originaux tiendront un livre à deux mains. Une fois la nuit tombée, se pose l'hémistiche de l'alexandrin quotidien. Nos six premières syllabes sont structurées, les six dernières, quand on est jeune et con, sont pour le moins bizarres.


En effet, au lendemain de certaines soirées alcoolisées (non Saint Patrick, c'est pas de toi que je parle) j'ai l'habitude de consacrer quelques secondes à ma contemplation dans le miroir et à me demander pourquoi. Pourquoi je me suis trouvé si drôle hier soir, pourquoi j'ai cru logique de me planter devant le tramway et d'imaginer à haute voix les discussions entre le conducteur et les agents de service, pourquoi tout le monde était dans la rue un mercredi soir du mois de mars ? Pourquoi un jour de Saint Patrick ? On aurait pu déclarer Sainte Marguerite jour festif.

Parce que la bière. Bon, j'apprends rien à personne, la bière, ça excite les foules et c'est certainement pour ça qu'il y a plus de monde aux festivals de musique estivaux qu'aux rassemblement du MRJC.

Il n'est pas rare, pour n'importe qui, de rencontrer sur facebook des statuts du type « gé tro envi de mmetr la min ki é cho ? » ou « Migraine...trop d'alcool hier lol ». Bon alors, on a beau savoir que l'acool rend con, peut vous tuer sur la route, peut vous faire vomir en public ou vous donner un lendemain difficile à gérer, on continue, depuis la nuit des temps, pourquoi ?

Au risque de tomber dans le pathos en remettant en cause les considération du jeune français (je parle de ce que je vois, je ne doute pas que les choses trouvent de l'écho dans d'autres pays), quand je regarde le miroir, le jeudi matin, 15h30, je me demande, surtout, pourquoi on était tous dehors à boire. La Saint Patrick est un cas à part, il est peut-être pertinent de placer ce questionnement un dimanche matin, à 15h30, plutôt.

Parce que c'est la même chose à chaque fois, le début de soirée est sympa et on boit des bières à une terrasse, et puis on a tous une bouteille d'eau minérale qui sent pas l'eau minérale dans notre sac, et puis vers 23h, tout le monde commence à trouver ça plus simple de discuter dans la rue. Et puis il y en a qui vont danser, d'autres qui restent près des fontaines pour faire les cons. Ça y est, l'apogée est atteinte vers minuit, à peu près tout le monde est bourré et la suite de la soirée appartient à chacun, ça serait compliqué d'en faire un résumé.

Moi je me demande pourquoi on boit. A première vue, c'est pour être heureux, détendus. Est-ce que nous, on ne sait pas être heureux par nous même ? Est-ce que pendant le temps que dure notre sobriété, on est malheureux ? Ou est-ce que le contexte du samedi soir nous pousse à contracter un autre genre de 'bonheur' ? En boîte par exemple, un type qui vient de battre son propre record à Donkey Kong, une fille qui a eu 14 en Histoire littéraire et la bande de mecs qui ont gagné leur match de 46ème division contre Lunel, tout le monde s'en fout, à priori. On est là pour être beau malgré le flot ininterrompu de corps contre le notre et la musique tellement forte qu'elle nous ferait presque transpirer.

Pas mal de gens connaissent la chansons de Stromae, et pas mal de gens vont danser sur cette chanson, dans les fêtes, reste à savoir si pas mal de gens auront un goût de malaise dans la bouche s'ils arrivent à entendre les paroles.

Alors le seul bonheur qui vaille, dans ce monde là, c'est la désinhibition. OUI l'alcool désinhibe, je sais que tout le monde le sait, que c'est limite écrit sur l'étiquette.

Mais la question c'est pourquoi a-t-on besoin de se lâcher ?

Pour choper ? Ben oui, si un garçon, midi et quart, marche dans la rue, attrape une fille par la taille et lui roule une pelle, tout ce qu'il récoltera, ça sera une claque de la jeune fille, et un fourgon de flic près à l'accuser de crime sexuel. Au Macumba, non seulement ça sera un mec vachement audacieux, et en plus, il risque de rentrer à la maison avec la fille (bon, pas si c'est François Xavier Demaison, hein).

Donc voilà, revenons en à nos cours de philo de terminale, chacun cherche le bonheur, le bonheur c'est l'amour, l'amour c'est être capable de se lâcher pour aborder la fille/le mec qui nous plait.

Pour rigoler, simplement ? Ben oui, faut croire que le collège c'est bien fini, à l'époque, on se contentait tous d'un après midi au skate park et d'une bouteille d'Oasis avec des Granola, on s'empressait d'en faire le résumé dans notre journal intime une fois rentrés à la raison, parce que, franchement, il y avait rien de mieux.

Mais qu'est-ce qui change ? Entre ces deux conceptions du bonheur ? Qu'est-ce qui pourrit dans notre tête, pour rendre nos moments d'exaltations moindres, si ce n'est sales. Tout me parait sale dans la beuverie, la pisse en public, le vomi derrière les poubelles, les tronches sur les photos, les mots qu'on aurait aimé ne pas dire, les messages qu'on aurait pas du envoyer, les filles qui se cassent la figure sur leurs hauts talons, les mecs qui font peur aux filles, tard le soir, les voitures qui partent dans le décors. Il y a pas grand chose de drôle là dedans.

A part ce qu'on génère, nous, les blagues qu'on fait à nos amis, et la chorégraphie du robot sur toutes les chansons des années 90's. Est-ce que les gens oublient qu'ils sont pas drôles et qu'ils ont pas la vie qu'ils voudraient, quand ils rigolent à tout et n'importe quoi sur un air de David Guetta ?

Donc quoi ? On est en 2010, on est tous pourris jusqu'à la moelle ? C'est parce qu'on est la génération qui a vu naître Google et les iPhone que ça se passe comme ça ? Ma mère ne buvait pas et mon père ne me parle pas de sa jeunesse, mais j'aimerais bien savoir, ça a toujours été comme ça ou on est les premiers ? Est-ce que la phrase type « l'excès de nouvelles technologie, au lieu de favoriser le contact, l'a plutôt annihilé ? » a ici une place ? La seule façon de trouver l'amour sent l'alcool et le vomi ?